dimanche 27 février 2011

Présidentocratie ?

La présidentocratie étouffe la démocratie wallonne

Un directoire de quatre présidents de partis régente de plus en plus la vie politique en Wallonie, tout en la diluant dans le cadre élastique d'une supposée Fédération wallo-bruxelloise. Face à cette dérive - la présidentocratie- nous préconisons une réforme radicale.


D'où vient la présidentocratie ?


Depuis le début des années 90, quand un parlementaire devient ministre et tant qu'il le demeure, il ne siège plus au Parlement. Un suppléant le remplace. Les Assemblées se retrouvent ainsi peuplées d'inconnus qui profitent du rang qu'on leur a attribué sur les listes électorales. A la Chambre, il y a 52 suppléants sur 150 députés, 8 suppléants sur les 10 députés CDH ! Au Parlement wallon il n'y a que 16 suppléants sur 75 députés, mais 12 suppléants sur les 29 députés PS! On a toujours nommé des ministres hors du Parlement, mais la pratique s'est renforcée. Les présidents de partis les ont toujours désignés, mais avant ils prenaient en compte : résultats électoraux, présence sur le terrain, poids des fédérations, des intérêts représentés (syndicats, mutuelles...), travail parlementaire. Actuellement, une carrière commence souvent avec l'attribution d'un poste ministériel ensuite légitimée, avec des fortunes diverses, par l'électeur. Chaque scrutin « national » se conclut par un jeu de chaise musicale parlementaire et ministériel.


Par ailleurs, les médias trivialisent la vie politique en privilégiant l'immédiat par rapport au fondamental. Ils accentuent la pipolisation du personnel politique. Les différences entre partis ne sont plus idéologiques, mais historiques, vestiges des clivages (flamands/wallons, catholiques/laïcs, conservateurs/progressistes, etc.), qui contribuèrent à structurer la vie collective en piliers. La présidentocratie résulte de l'élection directe, par les affiliés aux partis, de présidents qui furent toujours puissants, mais qui autrefois avaient à compter avec des contre-pouvoirs : fédérations au niveau des provinces ou des arrondissements électoraux, poids électoral de l'élu, etc. Aujourd'hui, même si la participation à leur élection est souvent très inférieure à la majorité des adhérents, les présidents de partis peuvent se prémunir des critiques en se targuant de la légitimité que cette élection leur confère! Ce qui aurait pu permettre une saine compétition et des débats d'idées se transforme en kermesse médiatique au bénéfice d'un candidat ou d'une paire de candidats uniques. Quel politique oserait aujourd'hui se lever contre un président élu avec 90% des suffrages ? Et quand ce mandat présidentiel est cumulé avec une fonction de vice-premier ministre fédéral, il n'y a plus d'espace pour le débat interne. Le quadriumvirat présidentiel (PS, MR, CDH, Ecolo), avec ses deux Augustes et ses deux Césars, paralyse le débat. La mainmise présidentielle s'étend même au choix des chefs de groupes parlementaires, dont les secrétaires, chiens de garde présidentiels, filtrent l'action des élus. Ceci est à relier à la crise de la démocratie représentative dont l'un des enfants monstrueux est le berlusconisme, mélange de fortune privée, de pouvoir médiatique et de pipolisation trash mobilisés au profit de la conquête et de la conservation du Pouvoir.


Lire aussi:
Contre la non-pensée unique
Karel De Gucht, commissaire européen et libéral teinté dans la masse, publie dans De Standaard un remarquable essai comme on ne voit plus guère de politicien francophone capable d’en commettre un semblable. Richard Miller peut-être, s’il se souvenait qu’il est philosophe; ou Philippe Moureaux, sans doute, mais il n’est plus tout-à-fait de cette génération-ci et, d’ailleurs, il préfère désormais jouer les Nestor Burma… De toutes façons, quel journal francophone oserait publier un article de fond s’étalant sur trois pleines pages sobrement composées?

Mais ne boudons pas notre bonheur. Et suivons ça en néerlandais puisqu’il faut aller au nord pour parler politique et échapper quelques instants à la langue de bois de la pensée unique et donc sidéralement vide de l’irrédentisme wallobruxien.


Une autre carte politique de Flandre est-elle occupée à se dessiner sous nos yeux? Oui et non, dirai-je au risque de faire encore hurler de rire à mes dépens mes amis de « Sans langue de bois » qui s’ébaubissent toujours de mon goût pleinement assumé pour la nuance.

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